Critique de Lever de soleil sur la moisson : tome nécessaire ou superflu ?
- Mathilde
- 2 août
- 9 min de lecture

Bonjour à tous, les lecteurs ! C’est avec une grande joie que je me replonge dans l’univers tant apprécié de Suzanne Collins pour vous partager ma critique du dernier tome de la saga Hunger Games, Lever de soleil sur la moisson. Comme vous le savez sûrement si vous avez déjà lu mes précédents articles sur le sujet, les Hunger Games sont des livres très chers à mon cœur ; la trilogie originale m’ayant fait découvrir le genre littéraire de la dystopie, un de mes genres préférés, encore à ce jour. J’étais donc obligée de me rendre en librairie le jour de sa sortie française pour acheter le petit dernier, un préquel consacré au mentor de Peeta et Katniss, Haymitch Abernathy, qui se déroule lors des jeux qu’il a remportés. Contrairement à de nombreux fans de la saga, je n’attendais pas particulièrement d’autre préquel, et encore moins un préquel sur Haymitch, après la sortie de La Ballade du serpent et de l’oiseau chanteur en 2020. Ce dernier étant mon livre préféré de la saga, je craignais que Suzanne Collins ne parvienne pas à se hisser au même niveau pour Lever de soleil sur la moisson. C’est donc avec une grande hâte de retrouver l’univers de Panem, mais une aussi grande appréhension d’être déçue, que j’ai commencé le cinquième livre de la saga.
Est-il, selon moi, à la hauteur du précédent préquel ? Contient-il trop de fan service ? Était-ce un tome nécessaire ou superflu ? Voilà autant de questions auxquels je vais répondre dans cette critique, qui sera divisée en deux parties : une ne contenant pas de spoilers (mais qui peut contenir des informations provenant du reste de la saga), et une autre dans laquelle je vous partagerai mon avis sur certains éléments précis de l’intrigue.
Partie sans spoilers
Un retour dans l’arène efficace… mais que reste-t-il à découvrir ?
Sans surprise, Suzanne Collins manie toujours les mots avec autant de maîtrise. Sa plume très agréable à lire nous replonge immédiatement dans l’univers sombre de Panem avant les bouleversements provoqués par les 64e Hunger Games. Véritable page-turner, ce livre se dévore grâce à une fluidité d’écriture rarement égalée.
En revanche, le plus gros point noir du livre, selon moi, est son manque de surprise. On a comme un goût de déjà vu, dû à l’angle adopté, au postulat du livre, qui est de raconter un énième Hunger Games du point du vue d’un tribut. Contrairement au précédent préquel, qui choisissait de laisser voix au chapitre à un citoyen du capitole, et de raconter en détails l’après Hunger Games, Lever de soleil répète un schéma bien connu des lecteurs de la saga. De plus, en choisissant de se concentrer sur un tribut du district 12, Suzanne Collins ramène ses lecteurs en terrain connu, en les confrontant de nouveau aux mêmes lieux, problématiques et personnages que lors du premier tome de la saga originale. Enfin, ce qui a tant attiré les fans au point de les inciter à demander un préquel sur Haymitch est bien, selon moi, ce qui constitue le plus gros défaut du livre : L’Embrasement nous dévoilait déjà tout. Le deuxième tome de la saga originale nous donnait déjà un aperçu des jeux d’Haymitch. Le.a lecteur.trice fan de Hunger Games (que j’étais moi-même au moment de ma lecture) connaissait déjà la façon dont Haymitch gagnait ses jeux ainsi que ce qui arrivait à certains personnages. Donc même si Lever de soleil nous montre l’envers du décor des événements racontés dans L’Embrasement, et nous dévoile les véritables intentions et motivations de certains personnages, il reste, selon moi, moins intéressant à découvrir, et a une valeur ajoutée moindre comparée à La Ballade.
Paradoxalement, en dehors de ce manque de surprise, l’intrigue et le rythme sont très bien menés, ce qui fait de Lever de soleil un excellent livre pris séparément, mais le moins intéressant des cinq Hunger Games lorsqu’on regarde la saga dans son ensemble.
Un florilège de personnages variés mais inégalement développés et attachants
Les personnages constituent probablement l’élément le plus réussi de la saga Hunger Games. Suzanne Collins sait indéniablement créer des personnages profonds, complexes, et dont le développement permet de comprendre chacune de leurs actions et attitudes. Toutefois, j’ai trouvé que le traitement des personnages de Lever de soleil était plutôt inégal.
Haymitch, en tant que protagoniste, est évidemment celui qui bénéficie du développement le plus complet. Le.a lecteur.trice en apprend davantage sur son passé, sur ses relations, sur sa psychologie. On vit avec lui le traumatisme des jeux et de ce qui les suit, rien de plus normal, me direz-vous, dans un préquel consacré au futur mentor de Katniss et Peeta. Toutefois, j’aurais aimé que l’aspect psychologie du personnage soit poussé encore plus loin. J’ai trouvé la partie sur son retour des jeux un peu trop courte, alors que mes attentes étaient principalement tournées vers ce passage du livre. On n’en apprend pas vraiment plus comparé à ce qui nous était déjà révélé dans L’Embrasement. De plus, n’étant pas une grande fan d’Haymitch dans la trilogie originale, je m’attendais à ce que ce livre me le rende plus attachant. Or, j’éprouve toujours le même intérêt modéré pour le personnage. J’ai aimé suivre son histoire, j’ai éprouvé de l’empathie pour lui et été terrassée avec lui lors des épreuves qu’il a subies, mais il reste bon dernier dans le classement des protagonistes que j’ai préféré suivre, derrière Katniss et Coriolanus Snow.
En revanche, j’ai trouvé le personnage de la copine d’Haymitch, Lenore Dove, bien plus intéressant. Son histoire avec Haymitch est très touchante. J’ai aimé découvrir et en apprendre plus, bien que de façon superficielle, sur certains membres de sa famille. Toutefois, j’ai trouvé qu’elle ressemblait un peu trop à un autre personnage de la saga. De plus, il est difficile de s’attacher complètement à elle étant donné que son destin nous avait déjà été dévoilé dans L’Embrasement. D’ailleurs, ce constat s’applique également à de nombreux autres personnages du roman, comme tous les autres tributs.
Enfin, ce que je reproche le plus à ce livre est qu’il fait revenir de nombreux personnages issus des précédents tomes, ce qui m’a donné l’impression que Suzanne Collins succombait à la tentation du fan-service, procédé auquel elle avait su résister pour les quatre tomes précédents. Et au-delà de la facilité auquel j’associe cette méthode, je trouve que le fan-service nuit à la cohérence de la saga. On sent que l’autrice n’avait pas tout prévu, ce qui se ressent dans les relations entre les personnages. Il y a comme une dissonance entre la façon dont les personnages devraient agir entre eux dans la trilogie originale s’ils s’étaient véritablement rencontrés dans Lever de soleil, et la façon dont ils agissent en réalité. Alors même si l’apparition de ces personnages permet d’expliquer certaines répliques ou certaines situations, j’ai tendance à surtout remarquer les faux-raccords.
Pour conclure cette partie sans spoilers, je tiens à préciser que, malgré ce que peut laisser entendre les précédents paragraphes, j’ai aimé Lever de soleil sur la moisson, seulement la saga nous a habitués à des standards tellement élevés qu’il est difficile de ne pas remarquer ne serait-ce qu’une très légère baisse de niveau. Je vous recommande à 100% sa lecture si vous avez aimé la saga originale, et je pense que Suzanne Collins devrait s’arrêter là pour la saga Hunger Games. Lever de soleil flirte avec les caractéristiques du tome de trop, et cela me décevrait que l’autrice explore le passé d’autres personnages uniquement pour capitaliser sur son œuvre, même si la qualité d’écriture est toujours au rendez-vous. Je pense qu’il est maintenant temps de laisser aux lecteurs le soin de combler les questions laissées sans réponse avec leur imagination.
Partie AVEC spoilers
Sérieusement, que fait Effie dans ce livre ?!
Comme évoqué précédemment, je trouve que le livre souffre de l’incursion de personnages de la trilogie. Autant la présence de certains est facilement justifiable et cohérente avec les autres tomes, comme celle de Plutarque, de Beetee ou de Mags, autant pour d’autres, je trouve que cela a entaché la cohérence de l’univers. Qui avait besoin de voir Wiress et les parents de Katniss, qui semblent être des inconnus aux yeux d’Haymitch avant que celui-ci les « rencontre » dans la trilogie ? Pire, que fait Effie dans ce livre ? Haymitch et Effie semblent développer un début de relation complice dans Lever de soleil, mais cette complicité ne se ressent qu’à partir de L’Embrasement et non dans le premier tome de la trilogie. Sa présence relève pour moi du pur fan-service.
En revanche, j’ai trouvé le retour des Covey plus subtil et bien plus cohérent, même si cela peut donner l’impression que le district 12 est un petit village au sein duquel tout le monde se connait. Cela permet de justifier la haine de Snow envers Haymitch, en plus du fait qu’il a intenté une révolution, mais permet aussi un parallèle intéressant entre Snow et Haymitch. En effet, ces deux personnages ont tous deux vécu des parcours relativement similaires au début mais aux issues totalement opposées. Les deux vivaient dans la pauvreté, sont tombés amoureux d’une Covey, ont été impliqués dans les Hunger Games, y ont survécu, et ont perdu leur Covey, ce qui les a endurcis. Mais là où Snow s’est lui-même débarrassé de Lucy Gray et s’est efforcé de ne plus laisser les sentiments l’éloigner de son but, Haymitch s’est retrouvé dévasté par cette perte causée par un autre, et ses sentiments pour Lenore lui ont donné un but et ont guidé chacune de ses actions. J’ai d’ailleurs trouvé que la scène de la mort de Lenore était la meilleure du livre. La cause de sa mort s’imbrique très bien dans le reste de l’intrigue, et parvient à nous surprendre, parce que même si nous savions qu’elle avait été tuée par le capitole, rien n’aurait pu nous préparer à la cruauté des circonstances de sa mort. J’ai trouvé sa justification du titre absolument brillante ; quoi de mieux que d’utiliser le moment culminant de la vie d’Haymitch pour nommer le préquel qui lui est consacré. Et cette scène est tellement bien écrite, tellement forte émotionnellement… je pense que plus d’un.e lecteur.trice a été dévasté.e en la lisant !
Ce tome nous permet aussi de comprendre, voire de vivre viscéralement la haine des vainqueurs envers le président Snow. On avait déjà appris ce que le capitole leur faisait subir avec les histoires de Haymitch et de Finnick, révélées dans la trilogie, mais je ne m’attendais pas du tout à ce que ce tome nous montre l’histoire de Beetee. J’ai trouvé son histoire avec son fils extrêmement émouvante et sa résignation face à sa mort imminente tellement déchirante ! Lever de soleil permet aux fans de haïr de nouveau le président Snow, après le dernier préquel qui nous avait fait comprendre sa psychologie, et avait (presque) réussi à le rendre attachant. J’ai également trouvé très intéressant le fait d’exposer la faiblesse du Président de Panem dans ce livre. Le dépeindre souffrant dès sa première apparition dans le livre montre à la fois au protagoniste et au.à la lecteur.trice qu’il n’est pas invincible, et cette perspective va ensuite aider Haymitch à ne pas perdre espoir et à croire en la révolution.
Enfin, comme évoqué dans la partie sans spoilers, j’ai trouvé la dernière partie du livre vraiment intéressante… mais trop courte ! J’aurais aimé qu’un tiers du livre soit consacré à la façon dont Haymitch est tombé dans l’alcool, à sa marginalisation, à son syndrome post-traumatique. Et j’ai bien évidemment adoré l’épilogue. Cela fait tellement de bien de revoir Haymitch heureux après tout ce qu’il a enduré, en paix avec son passé après avoir accompli la mission qui lui avait été confiée par Lenore. Alors même si la présence de Katniss et Peeta peut être considéré comme du fan-service, je suis prête à l’accepter, et je ne me pose qu’une seule question : comment cette scène va-t-elle être adaptée sur grand écran, au vu de la popularité actuelle de leurs acteurs ?
Un retour à Panem justifié par les messages que veut faire passer l’autrice
Suzanne Collins avait un jour déclaré qu’elle ne réécrirait un nouveau Hunger Games que si elle avait de nouveau des choses à dire, un message à faire passer. Et en effet, Lever de soleil est probablement le tome avec le plus d’allusions philosophiques. Celles-ci sont d’ailleurs expliquées dans cette interview de l’autrice, que j’ai trouvé extrêmement intéressante. J’ai aussi trouvé le passage dans lequel Plutarch explique à Haymitch que la lecture n’est pas un passe-temps très populaire au capitole et que, puisque les gens ne lisent plus, on peut plus aisément leur faire croire n’importe quoi, très fort dans le contexte actuel. Ainsi, même si j’ai pu souligner à de nombreuses reprises dans mon article des détails faisant penser à du fan-service, on sent que Suzanne Collins met toujours autant de cœur et de puissance allégorique et métaphorique dans ses ouvrages, ce qui fait de Lever de soleil sur la moisson un tome plus nécessaire que réellement superflu.
En conclusion, Lever de soleil sur la moisson reste mon tome le moins aimé de la saga, mais surtout parce qu’il souffre de la comparaison avec le précédent préquel qui était mon préféré. Et même si j’aimerais que ce Hunger Games soit le dernier et que je l’ai trouvé assez répétitif, je comprends pourquoi Suzanne Collins s’est de nouveau servie de sa plume pour nous faire revenir à Panem, et quelle plume ! Les livres de l’autrice sont toujours aussi forts et plaisants à lire. C’est pourquoi, malgré tout ce que j’ai pu reprocher au livre, si un nouveau Hunger Games sortait en librairie, je serais de nouveau au rendez-vous.
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