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Et ils meurent tous les deux à la fin, ou comment me faire apprécier la romance

Dernière mise à jour : 25 sept. 2022


Critique Et ils meurent tous les deux à la fin Adam Silvera romance young-adult LGBT

Bonjour à tous, les lecteurs ! Cela faisait un petit moment que je n’avais pas sorti de critique sur un livre que je venais de découvrir mais le temps est venu d’y remédier. Au début du mois, j’ai fini le roman Et ils meurent tous les deux à la fin d’Adam Silvera. Il faut savoir que je voulais lire ce livre depuis assez longtemps. La première fois que je l’ai aperçu sur les étagères du CDI, son titre m’a intriguée et j’ai donc décidé de le commencer. Malheureusement je n’avais jamais eu l’occasion de le terminer, jusqu’à ce que l’un de mes amis me le prête. Et si j’écris cet article c’est parce que ce livre a été une révélation. Je l’ai tout simplement adoré.

Et pourtant ça n’était pas gagné d’avance ! Ceux qui me connaissent savent que la romance n’est pas mon genre littéraire de prédilection et que l’amour de manière générale a tendance à vite m’écœurer… Découvrez dans la suite de cet article les raisons qui m’ont poussées à remettre en question mon aversion pour ce genre littéraire.


Et s'il ne vous restait plus qu’un jour à vivre ?


Et ils meurent tous les deux à la fin situe son intrigue dans un futur proche dans lequel les individus sont informés vers minuit qu’ils vont mourir dans la journée. Le cinq septembre, Rufus et Mateo, deux adolescents de dix-huit ans alors inconnus, reçoivent le funeste appel et choisissent de vivre à fond leur dernière journée. Ils décident de s’inscrire sur l’application Le Dernier Ami et viennent à rentrer en contact et à passer leur dernière journée ensembles. Peu à peu, une amitié va se développer entre les deux jeunes hommes, une amitié qui va beaucoup apporter à l’un comme à l’autre, une amitié qui va lentement se muer en quelque chose de plus fort encore…


Des personnages universels


Et ils meurent tous les deux à la fin est le premier livre écrit par Adam Silvera que j’ai lu, et également le seul, mais une chose est sûre : cet auteur sait créer des personnages ! Ils sont réellement l’un des gros points forts du roman. Les deux protagonistes sont véritablement attachants, qu’il s’agisse du timide Mateo, ou de Rufus, la tête brûlée. Ils sont également vraiment universels ; on peut tous s’identifier ou reconnaitre des personnes de notre entourage en Rufus ou en Mateo. Cependant, ils ne sont pas « clichés », ni redondants par rapport à d’autres personnages que l’on peut retrouver dans les romances young-adult. Ils ont chacun leur histoire, caractère et passions qui leur sont propres et les rendent d’autant plus profonds et intéressants.

Même les personnages plus secondaires sont tout aussi soignés. Que ce soit Lidia ou les Plutons, le groupe d'amis de Rufus, on s’attache tout autant à eux qu’aux personnages principaux. De plus, le livre change souvent de narrateur et de nombreux chapitres sont écrits du point de vue de personnages étrangers à l’intrigue principale. J’ai beaucoup aimé la phrase qui introduit systématiquement un nouveau narrateur, qui est, soit « Death-Cast a appelé un tel car il va mourir aujourd’hui », ou au contraire « Death-Cast n’a pas appelé un tel car il ne va pas mourir aujourd’hui ». Cela permet de lier tous les personnages entre eux, de rappeler qu’ils évoluent dans le même univers. Et on se surprend à se prendre d’affection pour tous ces narrateurs, même si on ne les suit que durant très peu de pages. Bien souvent, ils se croisent entre eux et l’abondance de points de vue différents nous permet de nous rendre compte d’à quel point seulement une personne, si insignifiante parait-elle, peut changer la vie entière d’une autre. De nombreux moments bouleversants ont lieu car deux narrateurs se sont simplement croisés. Cela ne fait que rendre tous ces personnages encore plus attachants et on a envie d’en savoir plus sur chacun, qu’un livre entier soit consacré à chacune de ces personnes.


Une romance peu prononcée


Si les personnages seuls sont très bien réussis et attachants, les relations entre eux le sont encore plus. Je l’ai laissé entendre en introduction, il y a bien une romance entre Rufus et Mateo dans le roman et elle ne m’a étonnamment pas déplu, ni même dérangé. Au contraire, je l’ai trouvé très bien amenée et surtout assez légère. Elle ne constitue pas le cœur du livre mais survient de manière très naturelle, sans que toute l’histoire ne soit basée dessus. La relation entre les deux jeunes garçons évolue très progressivement. Ils apprennent d’abord à se connaitre, durant une bonne partie du roman, et l’aspect amoureux ne va se développer que tardivement. J’ai donc aimé cette romance notamment du fait de sa brièveté.

Mais ce que j’ai également trouvé beau dans cette relation, c’est son caractère très sain. Elle apporte véritablement quelque chose aux deux individus. Elle permet à l’un de s’affirmer, de mieux apprendre à se connaitre et de s’ouvrir au monde, et à l’autre de se poser, d’être plus calme. De plus, du fait de sa brièveté, cette relation rejette tous les clichés et tous les « dramas » qui entourent généralement les histoires d’amour. Les deux protagonistes savent qu’ils vont bientôt mourir alors ils n’ont pas le temps de se mettre ensembles, de devoir l’annoncer d’abord aux amis, puis à la famille, puis publiquement avant de se quitter, pour se remettre ensembles, pour qu’une troisième personne entre en jeu mais que finalement cette troisième personne se mette en couple avec quelqu’un d’autre. L’absence de toutes ces péripéties futiles rend l’intrigue amoureuse d’une simplicité rafraichissante.


Un univers incroyable qui mérite d’être plus exploité


Un des seuls reproches que l’on peut faire à ce livre, ce qui prouve encore une fois qu’il s’agit d’un très bon livre, c’est le goût de « trop peu » ressenti à la fin. L’intrigue se déroule dans un univers riche et très intéressant. Imaginez comment toute la société se retrouverait bouleversée si on pouvait savoir à l’avance que l’on va mourir ! Certes, le roman exploite au mieux cet univers en nous décrivant comment Death-Cast peut modifier la routine et le comportement des gens, comment il est intégré dans les films, séries et autres œuvres, ou encore quels infrastructures ont été construites pour répondre à une nouvelle demande d’individus souhaitant condenser toute une vie en une seule journée. Mais on voudrait en savoir plus, notamment sur son fonctionnement. Personnellement, j’imagine un système à la Minority Report avec des individus spéciaux capables de prédire la mort et des machines qui peuvent interpréter ces prédictions. Le livre nous montre comment travaillent ceux qui sont chargés d’appeler les « Deckers », ceux qui vont mourir dans la journée, et s’intéresse à leur psychologie, ce que je trouve d’ailleurs très intéressant également. Cependant, le lecteur reste dans l’ignorance, tout comme les individus concernés par le système de Death-Cast dans le roman, quant à son fonctionnement, à la manière dont sont prédites les morts. Je comprends ce choix de l’auteur d’entretenir le mystère, de laisser aux lecteurs la possibilité d’imaginer leurs propres hypothèses. Néanmoins, cela reste très frustrant.


Une morale touchante


Paradoxalement, pour un livre qui a pour thème central la mort, ce roman célèbre la vie, comme peu l’ont fait avant lui. Il encourage chacun de ses lecteurs à vivre chaque journée comme si c’était la dernière. On voit les personnages de Rufus et de Mateo mourir avant d’avoir pu vivre toutes les expériences qu’ils auraient souhaité. Mais on les voit aussi profiter de leur dernière journée comme jamais, tenter des choses qu’ils ont trop longtemps eu peur d’essayer, découvrir le monde qui les entoure. Le lecteur ne peut que vouloir, lui aussi, vivre intensément et sans craintes. Et ils meurent tous les deux à la fin est donc un touchant hymne à la vie qui ne peut laisser personne indifférent.

En plus d’un célébration de la vie, on peut y déceler un message de tolérance. En effet, on peut voir le livre comme un défenseur de la cause LGBT, notamment avec les phrases choc de Rufus qui se méfie de « ceux qui s’intéresse encore à qui on embrasse ». L’homosexualité, tout comme la romance de manière plus générale, est traité comme elle devrait toujours l’être : comme quelque chose de normal. La postface touchante dans laquelle l’auteur dévoile son histoire contribue grandement à ce message. Il raconte qu’il s’est trop longtemps caché, qu’il a trop longtemps gardé son homosexualité secrète. Il encourage tous ses lecteurs à s’accepter, à ne pas se cacher, à vivre tel qu’il ou elle l’entend, car si on attend trop, on profitera moins de la vie. Contrairement aux protagonistes du roman, on ne sait jamais quel jour sera notre dernier alors autant être soi-même et vivre chaque jour comme si c’était le dernier afin de n’avoir aucun regret le moment venu.


Un suspense haletant


Même si le titre, et le début du roman, nous spoil dès les premières pages l’issue funeste de ce dernier, le suspense n’est en rien anéanti. Au contraire, cela ne fait que le renforcer. D’une part, les personnages sont tellement attachants que, même si on sait qu’ils vont mourir, car il s’agit d’un élément clé du livre sans cesse répété, on ne peut s’empêcher d’espérer qu’ils vont survivre. Les péripéties s’enchainent et au moindre danger, du plus grand incendie au plus anodin passage piéton, on s’inquiète pour la vie des personnages. On sait qu’ils vont mourir mais on ne sait pas quand, ni comment. Alors l’auteur joue avec nos nerfs en faisant se dérouler des événements possiblement mortels pour nos personnages. Et même lorsqu’on est sûrs que tel ou tel personnage va mourir au cours de tel ou tel incident, un retournement de situation retarde le moment fatidique. Pour autant, je n’ai absolument pas trouvé la fin tirée par les cheveux. Bien au contraire, j’ai été très surprise car on ne la voit absolument pas venir, mais je l’ai trouvé tellement cohérente et logique quand on y réfléchit. C’est donc en évoquant cette fin que je clôture la partie sans spoilers de cet article. Je tiens seulement à réagit au dénouement du roman, dans une petite partie avec spoilers, car cette dernière m’a tellement marquée que je ressens le besoin de vous en parler.


 

Petite partie AVEC spoilers


Une fin forte en émotions et en symbolique


Wow ! Je ne trouverai pas de meilleur mot pour qualifier la fin de ce roman. Par ordre chronologique, je voudrais d’abord évoquer la mort de Mateo. Ce dernier meurt incendié par sa gazinière, soit par son propre appartement, son chez-soi bien confortable, dans lequel il se sentait en sécurité. J’ai trouvé cette mort forte en symbolique puisque le jeune homme qui craignait de sortir, d’être confronté aux dangers du monde extérieur, s’est finalement retrouvé tué par ce en quoi il avait confiance, par sa zone de confort. Encore une fois, cela rejoint la morale du livre qui est de vivre chaque jour comme s’il s’agissait du dernier. La mort de Mateo nous monte qu’il ne faut pas avoir peur de l’inconnu car c’est précisément ce que l’on connait le mieux qui peut causer notre mort.

Pour ce qui est de la fin de Rufus, je l’ai également trouvé inattendue parce que tout au long du roman, on nous fait croire qu’il va se faire tuer par Peck, ce qui, en un sens, aurait été cohérent et logique. Mais encore une fois, le livre a préféré lui donner une fin riche en symbolique car c’est la mort de Mateo qui tue Rufus. Une fois que sa raison de vivre n’est plus, il se laisse partir. Cependant, sa mort reste bien plus floue que celle de Mateo et j’aurais aimé en savoir plus, notamment avec le point de vue des Plutons, ou mieux encore, j’aurais voulu un épilogue avec le père de Mateo qui se réveille du coma et qui lit les lettres de Mateo et Rufus en cherchant à en savoir plus sur les circonstances de la mort des deux jeunes garçons. Mais je comprends également la volonté de l’auteur de terminer son livre à la mort de Rufus, une fois que la prophétie du titre s’est réalisée.


Quel lecture ! Si on m’avait dit six mois plus tôt que je dévorerai et que j’adorerai à ce point une romance, je n’y aurai pas cru. Je vous conseille donc bien évidemment de lire ce petit trésor de la littérature young-adult. L’écriture du livre est très fluide, ce qui le rend facile à lire, même pour quelqu’un qui lit peu. Je termine cet article en vous annonçant avec la plus grande joie une information que j’ai découvert en écrivant cet article : un préquel à Et ils meurent tous les deux à la fin est en préparation et sortira en anglais au mois d’octobre. On connait déjà son titre anglais : The first to die at the end, soit « Le premier à mourir à la fin » si on traduit littéralement, ainsi que son synopsis. J’ai vraiment hâte de découvrir ce nouveau livre et j’espère également pouvoir vous en faire une critique…

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